Dormir pour rêver, dormir pour se reposer, dormir pour pouvoir attaquer... Mais la nuit porte conseil plus qu'elle n'apporte sommeil parfois. Insomnie, un somme nié pour vivre plus longtemps cette transition entre deux unités : les journées. Le passage d'hier à demain, ce n'est pas aujourd'hui (la nuit ne pouvant être ce jour de hui), c'est maintenant, ici, dans ce silence, dans le souffle des êtres et de la ville endormie. Le corps ne voulait pas dormir, les idées se sont éveillées une à une et bientôt, nous serons demain, un demain que nous appellerons alors aujourd'hui.
L'insomnie c'est la maladie des trop grands rêveurs. Elle touche ceux qui n'ont qu'une seule peur : la crainte de ne pas dormir, ceux qui veulent rêver, laisser leurs esprits se libérer un peu. Mais non, les yeux se rouvrent régulièrement, se tournent vers le réveil, les idées sont encore trop logiques pour entrer dans la période dite paradoxale... Les paupières, les yeux, le réveil, les idées: le temps ne passe pas...Un quart d'heure s'est transformé en éternité, le temps ralentit, les choses s'allongent dans leur durée comme cette journée qui ne peut s'en finir, qui n'aura pas de transition, qui aboutira à demain en ma présence.
Se retrouver seule dans la nuit, face à mes pensées, mes angoisses, mes craintes fait naître une parole silencieuse. Je parle avec moi-même, avec ma mémoire, avec mes mains, mes yeux mais tout cela dans le silence le plus lourd, le plus pesant...Il ne faut pas perturber cette plénitude que je n'ai pas atteinte hier soir...Petite, je me chuchotais des histoires dans une langue approximative, voire tout à fait imaginaire. 20 ans plus tard, les longues heures à attendre le lendemain n'ont pas vraiment changé...Je continue à me raconter des histoires mais cette fois, elles sont plus claires, elles m'aident à me comprendre, à m'entendre... Le langage sera toujours mon remède à tout. Parler, communiquer, raconter des histoires ou dire la vérité...Laisser sortir les mots de mon cerveau par mes doigts ou par ma bouche, c'est ma seule arme et mon plus gros présent. Ma voix peut être douce et dure, drôle et triste, guide ou perdue...Et bientôt, elle sera interrogatrice, didactique, enseignante...Voilà où ma nuit me conduit : vers un réveil prématuré! Il est 5h du matin, dans exactement quatre jours, mon réveil retentira et je me préparerai à prendre le train qui me conduira à l'oral... Ma voix devra être mon outil, ma force. Il faudra scander à ce jury que je peux et surtout que je veux, dire, parler, raconter tout ce que je sais et tout ce que je découvre à mes élèves!
Un somme nié pour une réalité retrouvée ; insomnie, tant pis! Je dormirai pour de vrai ce soir, ou demain, je ne sais pas si nous sommes encore hier, toujours aujourd'hui ou bientôt demain...
Mais chut, ils dorment tous encore!